J.E. Sunde

9 Songs About Love

Sortie le 20 novembre 2020

Vietnam

Peu de temps après avoir atteint le sommet de la trentaine, le songwriter de Minneapolis Jon Edward Sunde a pris conscience que sa vie n’avait pas tout à fait suivi la trajectoire à laquelle il s’attendait. Presque une décennie passée aux côtés de son frère et de son meilleur ami au sein du trio folk magnétique The Daredevil Christopher Wright, ainsi que plusieurs albums solo, n’avaient apporté à Sunde qu’un succès d’estime. Les tournées (et l’envie proverbiale de les faire) avaient également épuisé son énergie et son ambition. Et surtout les vieux copains se mariaient déjà et élevaient leur famille, pendant que lui luttait pour faire fonctionner sa propre histoire d’amour. Il ne pouvait s’empêcher de penser : Il y a un truc qui ne va pas chez moi ?

« Je me suis battu avec cette impression vive que je n’avais pas de valeur, que j’avais gâché ma chance de trouver une compagne ou le bonheur, » se souvient Sunde. « C’était potentiellement gênant et déroutant. »

Pour explorer cette question et cette sensation de solitude, Sunde s’est une nouvelle fois tourné vers la chanson. Et plutôt que le désespoir, il a été surpris de rencontrer un thème universel plus motivant : l’amour. Pendant deux ans il a produit des mélodies qui, même sans inclure le mot du titre, s’appuyaient déjà sur les périls et les promesses de ce sentiment si vaste et profond. Dans « Your Love Leaves a Mark », il entrevoit la rédemption dans l’image banale d’un amant qui se lève du lit chaque matin et s’habille pour le travail. Dans « Clover », il considère de quelle manière nos opinions politiques et nos croyances sont généralement l’expression de ce que nous choisissons d’embrasser et d’aimer. Dans « I Love You, You’re My Friend », il fait le serment d’être vulnérable et ouvert avec les personnes qu’il aime, de donner la preuve de son amour en ne se cachant pas et en étant honnête.

Ensemble, ces neuf chansons sur l’amour forment le troisième album de Sunde, qui s’intitule avec fidélité 9 Songs About Love. Un disque au grand cœur qui donne un cadre à ces sentiments complexes avec une générosité et une franchise justes. 9 Songs About Love est un rappel poignant qu’il faut être bon envers soi-même et que l’on est digne d’amour, peu importe la forme ou le rythme de celui-ci. Récemment à l’aise avec la perception de son propre sort dans la vie et en amour, Sunde a conçu son album le plus beau et le plus fort à ce jour.

« J’ai commencé à m’apercevoir de plus en plus que, si je ressens les choses de cette façon, beaucoup d’autres gens aussi, dit Sunde. Je ne suis pas unique au point que ces pensées ne soient que les miennes. Et c’est ce que l’art nous apporte : lorsque vous entendez des mots qui résonnent, vous vous dites : « Oh, c’est moi. » Tout le monde est bizarre et paumé et attend au téléphone, attend d’être invité à la fête. J’espère que ces chansons décrocheront le téléphone et feront de l’invitation une aide. »

Ecrire ces chansons a parfois été une expérience inconfortable pour Sunde, même si beaucoup ont semblé arriver facilement. Bien qu’elles ne soient pas entièrement autobiographiques, elles proviennent d’un noyau dur d’expérience et d’introspection personnelles. « Sunset Strip », qui ouvre l’album sur une note légère et entraînante, documente le travail acharné qu’une tournée peut avoir sur une relation. « Risk », le final épique de l’album, postule que « l’amour est un risque qui en vaut la peine » (« Love’s a risk that’s worth the risk »), un pari qu’il a lui-même fait. Mais il s’est rendu compte que c’était une partie du problème. L’inconfort ne faisait qu’accentuer la douleur d’une honnêteté totale, c’était un effet secondaire au fait de tenir pleinement compte de sa propre réalité. « J’apprends à faire confiance à ce sentiment, dit Sunde. Ces chansons m’ont aidé à m’appuyer là-dessus. »

Il a également porté cette idée dans le studio. Dans les années qui ont suivi l’interruption de The Daredevil Christopher Wright, Sunde a tranquillement formé un groupe de nouveaux complices : le batteur Shane Leonard et le bassiste et tromboniste Andrew Thoreen. Ils ont tous deux joué sur le deuxième album solo de Sunde, Now I Feel Adore, en 2017, mais Sunde a voulu leur ouvrir davantage les chansons, pour laisser ces personnes qu’il aime influencer ces neuf chansons qui interrogent l’amour.

Avec son vieil ami Brian Joseph (Bon Iver, Sufjan Stevens), qui a coproduit le disque avec Leonard, ils ont gardé les chansons brutes et tranchantes, afin que chaque fioriture ne fasse que souligner le travail émotionnel et le poids des mots. Quand le trombone se lance dans un jeu de jambes cool sur « Love Gone to Seed », par exemple, cela souligne la futilité absurde qu’il y a à tenter de rattraper quelque chose qui veut se libérer. Et sur la pièce maîtresse de l’album, « I Don’t Care to Dance », Sunde fait cavalier seul, négociant avec courage les conditions de son bonheur naissant avec une partenaire qui l’accepte comme il est. C’est un moment de lucidité simple mais magnifique, toute confusion, toute vulnérabilité s’y sublimant dans une valse acoustique incisive.

« L’élaboration de 9 Songs About Love a été un véritable défi pour moi. C’est une philosophie, un travail sur la confiance en général : il n’y a pas de problème à se sentir un peu à nu et et à douter », dit Sunde. « Le risque en vaut la peine. »

Ces chansons modifieront-elles d’une manière ou d’une autre la carrière de Sunde ? Le mèneront-elles au premier plan (auquel il travaille depuis des années) ? C’est possible. Elles ont le potentiel pour devenir des hymnes générationnels mais c’est difficile à dire avec certitude, bien sûr. Quoi qu’il en soit, ce sont des chansons qui ont changé sa vie, des miroirs qu’il a créés et qu’il s’est tendus à lui-même pour constater qu’il est bien comme il est. Puissent-elles faire de même pour vous.

Grayson Haver Currin