Josiah Johnson

Every Feeling On A Loop

Sortie le 4 septembre 2020

ANTI- / Pias

Sur le point de sortir son tout premier album solo, Every Feeling on a Loop (ANTI-Records), le compositeur Josiah Johnson sait bien qu’il ne devrait pas être là. Il y a cinq ans, alors qu’il fait une pause avec le groupe d’indie-folk The Head and the Heart, il ne s’agit pas de savoir ce qu’il va faire de son côté, mais si son addiction va mettre un terme à sa carrière. Même à cette époque il n’était pas censé être là.

Avant de cofonder son groupe, Johnson étudie les mathématiques et l’informatique. Mais c’est une scène ouverte qui va changer sa vie. Au Conor Byrne Pub de Seattle, Johnson travaille avec des musiciens qui formeront The Head and the Heart. Le groupe monte très vite. Ils bénéficient d’une fanbase fidèle et tournent dans le monde entier à guichets fermés, sur des scènes prestigieuses comme The Fillmore et Red Rocks, ainsi que dans les festivals Coachella et Lollapalooza. Leur premier album éponyme de 2011 reçoit un disque d’or de la RIAA, puis Let’s Be Still en 2013 atteint le top 10 de Billboard.

« Ces premières années étaient sacrées. Un groupe de potes qui a la cote, qui explore le monde, qui réalise ses rêves. » Mais il finit par se rendre compte que tout va trop vite. « Je me vidais totalement. J’essayais de garder le rythme avec la vie de musicien en tournée. Ça n’a rien d’original. Quand j’y repense, j’ai vraiment beaucoup de tendresse pour ce jeune moi. »

Comme beaucoup de musiciens avant lui, Johnson se tourne vers la drogue pour supporter le burn-out et l’angoisse qui accompagnent sa nouvelle vie. Trop de nuits sans sommeil, aucun moyen de canaliser ses émotions, il brûle la chandelle par les deux bouts. Il sait que quelque chose ne tourne pas rond, il sait que sa famille et ses amis en ont aussi conscience, mais de l’extérieur sa vie a l’air parfaite. En plein milieu de l’écriture du troisième album de The Head and the Heart, Signs of Light, Johnson entre en cure de désintoxication. Lorsqu’il en sort son travail n’est pas terminé. Il essaye de s’y remettre en studio avec son groupe, mais on finit par lui dire : « On t’adore mais tu ne peux pas bosser avec nous en ce moment. »

« Je gagnais bien ma vie, je jouais dans un groupe que j’adorais. J’étais fiancé à quelqu’un que j’aimais. Et j’ai tout perdu. A l’origine je voulais tout récupérer. Mais j’ai vite compris que j’avais – encore – tort ! »

Avec le temps il devient lucide. Johnson dit qu’il pouvait se montrer plus honnête avec lui-même en écrivant des chansons qu’il s’était promis de ne jamais sortir. Malgré le fait que la musique lui vient régulièrement, Johnson s’imagine une vie sans retourner à la musique professionnelle. Il réfléchit à obtenir un diplôme en travail social. Mais la marmite de chansons continue de bouillir. Johnson cherche de nouveaux moyens de présenter ces morceaux. Il s’intéresse de près à l’enregistrement à la maison. Il expérimente avec des producteurs. Puis un show privé à New York l’amène à travailler avec un groupe de musiciens mené par Peter Lalish (Lucius). Après le concert, un ami proche dit à Johnson : « Je ne t’ai jamais vu incarner autant Josiah Johnson sur scène. » Le groupe formé pour cette soirée se retrouve en studio et enregistre ce qui deviendra le premier album solo de Johnson.

Sur Every Feeling on a Loop, la voix de baryton crooner de Johnson est soutenue par les arrangements musicaux très riches et les harmonies. Parfois les chansons ressemblent à des prières. D’autres fois l’exubérance de Joshua se rapproche de l’euphorie qu’il a toujours recherchée, acquise cette fois avec plus de sagesse et de travail. Il avoue se sentir un homme neuf en faisant cet album, retraçant son chemin hors des ténèbres vers la lumière, en utilisant la magie qu’il a toujours portée en lui.

Le single phare, « False Alarm », voit Johnson explorer les peurs et les douleurs de la jeunesse pour avancer, accompagné de trompettes en extase. Sur « Woman in a Man’s Life », sur un lit de batteries hypnotisantes et de cordes enflées, Johnson célèbre son identité queer, dévoilée très récemment. « Pendant longtemps j’ai ressenti une honte vis-à-vis de la douceur et de la sensibilité – qui sont des parties essentielles de moi. »

Sur « Nobody Knows », Johnson chante pour encourager les gens à partager et recevoir les vérités de leurs cœurs. Les messages, à l’instar de l’homme lui-même, sont une bouffée d’air bienvenue. « Une grande partie de l’évolution présentée dans cet album se situe autour du fait d’assumer ce que je révèle au monde, et cette chanson parle de prendre la responsabilité de la façon dont je prends soin de moi. Dans mon expérience avec l’addiction, il y a eu beaucoup de souffrance, mais je ne cherchais pas l’aide dont j’avais besoin. »

Enfant curieux et brillant élevé dans une communauté conservatrice et isolée, Johnson explique qu’il a appris très tôt quelles parties de lui étaient bien accueillies, et lesquelles ne l’étaient pas. Il y avait de l’amour dans cette communauté, mais pas assez pour lui. Aujourd’hui, après des années d’introspection et de convalescence, soutenu par la musique et par l’amour de ses proches et de sa famille, Johnson est prêt à écrire le prochain chapitre de sa vie. Et tout commence avec Every Feeling on a Loop.

« J’ai appris à apprécier mon processus. J’ai appris à aimer le fait d’avoir pris le chemin le plus long, et de reconnaître mes erreurs. J’accepte l’humilité et le doute. Ma priorité est que l’on me voie tel que je suis, là où m’a mené mon parcours. Et il m’a mené exactement là où je dois être. Le courage que j’ai acquis m’a permis d’être un meilleur ami pour les gens que j’aime. C’est ça mon cadeau. »