
New Radiations
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Sortie le 08 août 2025
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Bella Union

La dernière fois que nous avions entendu parler de Marissa Nadler, elle planait haut avec The Path of the Clouds et son EP compagnon, The Wrath of the Clouds. Aujourd’hui, elle revient avec New Radiations, son dixième album officiel : une collection brute, intime et saisissante de onze titres venus d’ailleurs.
Dès les premières notes, sa voix envoûtante et son fingerpicking délicat s’imposent avec grâce. Marissa Nadler tisse des harmonies à la manière des Everly Brothers sur des paysages sonores éthérés et solitaires, faits de distorsions fuzz, d’orgue Hammond et de synthétiseurs mystérieux. Une texture riche et une atmosphère prenante qui soulignent toute la chaleur et la fragilité de son univers. Chaque morceau s’ouvre comme une vignette d’une vie intérieure, chargé d’une émotion qui ne frappe vraiment qu’une fois le rideau levé.
Sur le plan lyrique, elle traverse le temps et l’espace, se glissant dans la peau de personnages à bord d’un Cessna en vol, d’un vaisseau spatial, d’une voiture en fuite, ou encore perdus dans des réalités parallèles. Son écriture est à la fois cinématographique et profondément personnelle. Dans le titre d’ouverture, elle incarne une aviatrice déterminée à accepter son sort: « I will fly around the world just to forget you / Try not to hit the mountains as I pass through / Blinded by sandstorms, no sight of the land below / My little Cessna’s due west, and I had to go. » (Je vais faire le tour du monde juste pour t’oublier / J’essaierai de ne pas heurter les montagnes en passant / Aveuglée par les tempêtes de sable, je ne vois plus la terre / Mon petit Cessna file vers l’ouest, et je dois partir).
Dans la chanson titre, elle confie : « Les vibrations psychiques et les nouvelles radiations m’ont épuisée » — un sentiment à la fois actuel et obsédant —, alors qu’elle tente de « briser le verre, nouer la fin de la scène ».
Dans ‘Bad Dreams Summertime’, elle se prépare à l’impact tandis que le monde s’effondre, brossant avec précision les contours de ses cauchemars.
Tout au long de New Radiations, le contraste entre les mélodies douces et les paroles sombres et viscérales est saisissant. Dans ‘Light Years’, elle se remémore : « Back in the day, you were all the rage, when you could still hypnotize her… you used to see light years inside her, you used to be right there beside her » (À l’époque, tu faisais fureur, quand tu pouvais encore l’hypnotiser… tu voyais des années-lumière en elle, tu étais juste à côté d’elle).
Dans ‘You Called Her Camellia’, le narrateur s’effondre : « This wasn’t the deal! (Her fading away) » (Ce n’était pas le deal ! (Elle s’éloigne), tandis que ‘Smoke Screen Selene’ lance un avertissement : « Don’t you let her destroy you like I did » (Ne la laisse pas te détruire comme je l’ai fait).
La ballade cosmique et meurtrière ‘Hatchet Man’ dévoile une scène d’hôtel glaçante : « The angel made him do it and he made me watch — he thought no one would notice her gone » (L’ange lui a fait faire et il m’a forcée à regarder — il pensait que personne ne remarquerait son absence), tandis que la narratrice s’échappe dans la nuit.
Dans ‘To Be the Moon King’, inspirée par le père de la fusée moderne, on suit un homme qui écrit des codes à l’envers dans des miroirs et construit des fusées artisanales dans son jardin, rêvant d’atteindre « Saturn’s rings, burning » (les anneaux de Saturne en feu).
Qu’elle s’exprime à la première personne ou qu’elle incarne d’autres voix, Marissa Nadler explore avec gravité et empathie les thèmes universels de l’amour et de la perte. L’album culmine avec ‘Sad Satellite’, un morceau lumineux où elle murmure : « I mistook you for the sky » (Je t’ai confondu avec le ciel), nous laissant suspendus entre nostalgie et libération.
Entièrement produit par Marissa Nadler, New Radiations a été enregistré à Nashville, entre les Haptown Studios, avec son ami Roger Moutenot, et son propre home studio. Le mixage est signé Randall Dunn (Earth, Sunn O)))) et les arrangements subtils et immersifs de Milky Burgess — son collaborateur de longue date — ajoutent une dimension hypnotique, entre guitare slide vertigineuse, synthés hypnagogiques et riffs granuleux aux allures de marée.
Contrairement à ses deux précédents albums, où les collaborations étaient nombreuses, New Radiations offre une vision plus introspective, recentrée sur l’essentiel. Naviguant entre les genres tout en restant fidèle à sa voix singulière, Marissa Nadler capte le tumulte du monde pour en extraire un moment de beauté suspendue. New Radiations n’est pas un simple album : c’est un jalon marquant dans sa carrière, un témoignage éclatant de sa vision et de son art.