Battles

Juice B Crypts

Sortie le 18 octobre 2019

Warp

Après les complexes Mirrored, Gloss Drop, Dross Glop et La Di Da Di, Battles reviennent cet automne avec leur quatrième album, Juice B Crypts, sur Warp Records. Une surabondance sensorielle d’informations qui remettra en perspective tout ce que vous croyiez savoir sur Battles.

 

La nouvelle line-up place Ian Williams (claviers, guitare, électronique) et John Stanier (batterie) au cœur du mystérieusement nommé Juice B Crypts, produit et mixé par Chris Tabron (Trash Talk, Beyonce, Mobb Deep, Ratking). Mélangeant boucles au synthé, lignes de batterie assassines et riffs cycliques, l’album flirte avec les nouvelles technologies, et médite sur l’authenticité tout en réinventant les classiques.

 

Dans la pure tradition Battles, le duo a dissimulé dans tout l’album des codes et des langages secrets dont lui seul a la clé. Qu’ont en commun Juice B Crypts, le compositeur de « Taxi », un synthétiseur analogique semi-modulaire soustractif, une foreuse à deux tiges à essence et un groupe des années 1970 avec quinze albums studio et six albums live à son actif ? Une des réponses indiquées par Ian est le concept de « medium », inventé par le critique d’art new-yorkais Clement Greenberg. Ce concept met en avant les capacités des artistes à manipuler les mediums en fonction de leur importance. A l’instar des peintres modernistes, Battles appliquent leur medium à eux : des arpèges très élaborés programmés sur un Elektron Octatrack, des progressions harmoniques psychotropes et pitch-shiftées, des signatures rythmiques étalées et des indices narratifs pour paroles. Tout ce qu’on pourrait attendre d’un groupe habitué aux chansons poussant perpétuellement les limites, comme « The Yabba », « Atlas » et « Ice Cream ».

 

L’annonce de la sortie de Juice B Crypts est accompagnée du single « Titanium 2 Step ». Avec un featuring de Sal Principato, légende de la no wave et membre du célèbre groupe new-yorkais des années 1980 Liquid Liquid, ce premier partage est un hommage à la ville de New York. « On a adoré faire cet album dans notre ville d’origine, New York. On est ravis que Sal fasse partie du morceau. On ne pouvait pas espérer mieux », explique John.

 

New-Yorkais d’origine, les membres de Battles n’y ont pourtant jamais écrit ou enregistré avant Juice B Crypts. Influencé par les rythmes inhérents à la ville, l’album fait le lien entre leurs expériences vécues et manquées ici. La pochette du disque, qui en dresse le plan, est l’œuvre d’un ami et artiste du coin, Andrew Kuo, dont les pixels en barres et triangles colorés testent les limites du plat de la 2-D en utilisant des manipulations 3-D, formant un motif optique à l’image du processus créatif de Battles, en codant des phrases ou des schémas avec des noms marquants.

 

A l’origine puits sans fond d’informations et de données, Juice B Crypts représente l’ingestion perpétuelle par l’apprentissage des machines des modulations humaines. Battles explorent des territoires inconnus en tant que duo pour la première fois, avec une approche de la composition et de la performance live cherchant à disloquer le format groupe traditionnel. Sur cet album ils sont devenus des plumes fantomatiques au cœur de la machine, opérant des changements de cap guidés uniquement par leurs instincts. Ian développe : « Il s’agit de progressions harmoniques, de résolutions, de revenir à la racine. On passe tout ça au tamis d’outils électroniques modernes, comme des générateurs d’effets, ou alors on régurgite des lignes mélodiques pour y ajouter les trucs traditionnels, mais en même temps on essaie de garder les relations harmoniques tout en les démolissant. »

 

Juice B Crypts s’ouvre avec « Ambulance », qui nous plonge directement au cœur du son de Battles avec ses boucles de guitares serrées et ses déconstructions et arrangements instrumentaux bien particuliers. « A Loop So Nice… » introduit de manière bizarrement superbe « They Played it Twice », avec la voix de la New-Yorkaise Xenia Rubinos. Battles invitent Prairie WWWW, le groupe psychédélique de Taipei, et le chanteur et icône rock Jon Anderson, du groupe Yes, sur le titre « Sugar Foot ». Non content de convier de nombreuses voix, dont Shabazz Palaces et tUnE-yArDs, l’album s’enorgueillit de temps forts instrumentaux, comme « Fort Greene Park » et le title track, qui émettent de puissants rayons d’énergie destinés à dérouter et embrouiller nos pensées. Sur le dernier titre de l’album, « The Last Supper On Shasta (feat. TunE-yArDs) », un piano rejoue les notes au synthé entendues au début de l’album, ravivant et altérant la boucle, montrant le potentiel infini de ces métaschémas présents partout, de la musique aux paroles, comme celles qu’on entend de la bouche de Prairie WWWW : “No beginning to the story, no end to the time”, en boucle tel un code redondant qui se tord dans le temps.