Jesca Hoop

Order Of Romance

Sortie le 16 septembre 2022

Memphis Industries

Jesca Hoop est de retour avec son sixième album, Order of Romance, un disque qui la renforce dans sa position de voix parmi les plus frappantes et les plus originales de la musique contemporaine. Order of Romance est l’album le plus complexe et le plus équilibré de Jesca Hoop à ce jour :  son écriture solide la place dans le sillage de Gershwin et de Paul Simon, mais ce qu’elle fait ne ressemble qu’à elle.

 

Comme bien des musiciens qui en 2020 allaient partir en tournée, Jesca Hoop a soudainement découvert qu’elle avait du temps devant elle, et comme bien des musiciens privés de scène, elle s’est tourné vers l’intérieur. Comme pour beaucoup d’autres personnes, ces jours chez elle comptent parmi les plus tumultueux de sa vie, et elle a trouvé la discipline et l’équilibre apportés par une routine d’écriture quotidienne essentiels pour faire face à l’inconnu qui nous a tous pris d’assaut durant cette période. Mais de toute évidence, Order of Romance n’est pas un journal de ces deux dernières années. Il s’agit d’une plongée en eaux profondes dans la création. Comme le dit Jesca, « J’ai entrepris de mûrir en tant qu’écrivain, de clarifier ma voix et mes positions, à travers des mélodies et des phrases que je suis la seule à pouvoir construire. Order of Romance donne l’impression qu’on a donné un instrument pour jouer au fil des chansons à chaque personne, personnage ou artiste que j’ai été au cours des nombreuses saisons de ma vie. »

 

Au cours de l’été 2021, Hoop s’est à nouveau aventurée au sud de sa ville d’adoption, Manchester, jusqu’à Bristol, pour faire équipe avec le producteur John Parish (PJ Harvey, Aldous Harding), son collaborateur sur Stonechild en 2019. Cette fois, l’aide supplémentaire est venue de Jess Vernon (This is the Kit), qui s’est chargé des arrangements pour un quintette de cuivres et de bois. Le batteur de légende Seb Rochford a apporté ses compétences, John Thorne joue de la basse, et Chloe Foy ainsi que Rachel Rimmer ont été engagées pour livrer les arrangements vocaux caractéristiques de Hoop. Le résultat est un mariage fructueux entre l’art de la chanson et les arrangements, doté d’un charme cinématographique et d’un lyrisme qui ouvrent un nouveau chapitre plein de vie chez une artiste qui connaît suffisamment son esprit, son cœur et sa voix pour s’y fier en territoire inconnu.

 

Order of Romance est donc une œuvre complète qui demande une attention particulière, une écoute active, un filigrane dont l’apparente légèreté cache une intention sérieuse. Les thèmes de l’empathie et de l’amitié s’entremêlent avec une poésie lucide et morale sur des sujets tels que le contrôle des armes à feu, les cultes religieux et politiques, ainsi que le réchauffement climatique.

 

Il y a « Sudden Light », une exploration de la manière dont sont tracées les lignes de démarcation, et pourquoi, mais aussi de ce qui nous pousse à nous rassembler sous des drapeaux et à fabriquer des ennemis. « Nous nous regroupons sous des drapeaux et des icônes pour nous protéger, explique Jesca. Pour rester en sécurité dans ce grand monde risqué. Nous fabriquons des ennemis et nous nous accrochons à une bannière. Peut-être que nous autres humains devrions nous ouvrir à d’autres manières d’œuvrer à la sécurité, dans cet endroit vaste et complexe que nous appelons la Terre. »

 

« Hatred Has a Mother » a vu le jour alors que Jesca Hoop était en tournée aux États-Unis au début de l’année 2020 avec Ani Di Franco. En regardant sur le côté de la scène, Hoop a été frappée par l’expression « Revolutionary Love » tirée de la chanson du même nom, alors inédite, de Di Franco, une chanson elle-même écrite en réponse à « See No Stranger : A Memoir and Manifesto of Revolutionary Love » de Valarie Kaur. Kaur décrit l’Amour révolutionnaire comme le choix d’œuvrer pour tous ceux qui ne nous ressemblent pas, pour nos adversaires qui nous font du mal et pour nous-mêmes. L’Amour révolutionnaire est une force qui cherche la justice et une entreprise de libération de la haine. Hoop reprend le flambeau avec « Hatred has A Mother », comme une dévotion à la pratique de l’Amour révolutionnaire et pour le transmettre à l’auditeur : « L’empathie est contagieuse. Le train quitte la gare. Tous à bord. » (“Empathy is contagious. The train is leaving the station. All aboard.”).

 

Retour sur sa jeunesse en Californie, « Firestorm » est un examen très personnel des effets du réchauffement climatique. Jesca explique : « J’ai passé des heures assise au pied du Colonel Armstrong, l’un de nos séquoias les plus anciens et les plus respectés, avec ses 94 mètres de haut et une base suffisamment large pour y faire passer une voiture. Je ressens le cœur du séquoia en flammes, qui brûle de l’intérieur, quand je vois mes vieux arbres dévorés par les feux de forêt de Californie. Des arbres qui connaissent mon nom. » Il y a de l’amour ici, et du chagrin aussi.

 

Se référant également à son enfance et s’appuyant sur la distance et l’éclairage que peut apporter le fait de quitter son pays natal, « One Way Mirror » établit des parallèles entre la polarisation et la radicalisation qui caractérisent pour une large part la politique américaine, voire mondiale. « Réchauffée par la lumière du gaz, explique Jes avec son inimitable tournure de phrase, j’ai repensé à mon enfance, à ce que c’était d’être endoctrinée dans une mentalité sectaire, à ce qu’il a fallu faire pour en sortir et à ce qu’il faut faire pour éviter de tomber dans une autre… »

 

Order of Romance est peut-être en fin de compte une exploration du travail d’équilibrage sans fin qui caractérise le fait d’être « humain », une approche et un examen de certains des thèmes et des problématiques majeurs de notre époque par le prisme individuel, une façon de trouver un sens et une sorte de foi dans un monde où tant de choses sont déconnectées et discordantes. « Je cherche de la réflexion et des solutions dans mes chansons, explique l’artiste. Je découvre qui je suis en un sens. Pendant quelques minutes, je peux exister dans la nature à mon plein potentiel, en exprimant exactement ce que je veux exprimer, en équilibre, dans la crainte, dans l’émerveillement et en pleine force. En tant qu’agent moral, un mode que je ne semble pas pouvoir éviter, mon écriture est un temps pris pour observer et poser des questions. Je trouve de l’humour dans notre malheur. Je trouve du danger dans le calcul. Je trouve la foi en dépit de notre triste état et je me sens en lien quand je la dessine avec ma voix. Je tiens bon, je tiens à travers la musique et je tends inévitablement vers la compassion. »